Compte rendu du stage « technologie collège » du jeudi 3 juin 2010
Ce stage, organisé par le secteur technologique du Snes académique a eu lieu dans les locaux du S3 de Lille et a rassemblé des professeurs de technologie et de STI. Il a permis d’échanger sur de nombreux sujets allant de la mise en place des nouveaux programmes de la discipline à la réforme du lycée.
Situation des collègues et conditions d’enseignement
Lors des présentations et du tour de table, il apparaît nettement que les groupes ont quasiment disparu sauf sur le niveau 6e où ils sont réglementaires puisque prévus par le B.O. (rappel : 1 h 30 dont 30 min en groupes à effectifs allégés). Par contre, l’existence de groupes dans les autres niveaux est liée à des situations locales, diverses avec des « arrangements internes » pouvant parfois se faire au détriment de l’horaire règlementaire élève (rappel : 1h30 en 6e, 5e et 4e ; 2h en 3e). Cette situation, conséquence directe de la réduction chaque année des moyens, rend impossible la mise en place des nouveaux programmes. Comment aborder ces programmes avec 25, 28 voire 30 élèves, comment mettre en place une démarche d’investigation dans ces conditions avec nos salles, en plus, à organiser en ilots ? Les témoignages des professeurs présents montrent que c’est difficile avec des groupes (dans les rares cas où ils existent encore) de 16 – 20 élèves, mais que c’est impossible avec des classes complètes. De plus, la plupart d’entre nous travaillons dans des salles trop petites pour accueillir autant d’élèves avec une telle organisation matérielle, ce qui pourrait amener des problèmes de sécurité pour les élèves.
Alors que les groupes sont prévus pour les classes de 6es, pourquoi ne le sont-ils pas pour les autres niveaux alors que les programmes suivent les mêmes logiques et organisation de la 6e à la 3e ? Nous demandons à ce que le travail en groupe ne soit plus préconisé mais officialisé comme pour le programme de 6e.
Lors du tour de table, il est à noter les situations difficiles dans lesquelles les collègues de STI sont envoyés en collège pour y enseigner la technologie. Ceux-ci ne sont pas du tout volontaires comme on peut l’entendre parfois et se sentent tout aussi démunis que leurs homologues de technologie face aux conditions d’enseignement dans les collèges et aux nouveaux programmes qu’ils découvrent du jour au lendemain. Nous rappelons qu’un professeur TZR ne peut être nommé plus de 8h hors discipline (http://www.lille.snes.edu/spip.php?article1700).
La mise en place des nouveaux programmes
Après 5 ans, les échanges avec les collègues montrent que le programme de 6e est maintenant assimilé et mis en place dans les établissements. Cela ne s’est pas fait sans difficultés (mais sans moyens) et il a fallu beaucoup d’investissement de chacun pour parvenir à une situation à peu près stable actuellement.
Concernant les nouveaux programmes de 5e, 4e et 3e, ils n’ont pu être appliqués dans leur totalité cette année. Beaucoup ont essayé de mettre en place celui de 5e, quelques uns celui de 4e, aucun pour celui de 3e. Sans moyens et sans formation, il était difficile de faire mieux sans parler d’une certaine aberration pédagogique de changer un programme pour un niveau lorsque les élèves ont pratiqué un programme totalement différent les années précédentes.
Sur ces nouveaux programmes qui, nous le rappelons, n’ont reçu aucun vote « POUR » lors de leur présentation au Conseil Supérieur de l’Education (CSE), il est difficile de synthétiser les expériences de chacun parce que chacun a fait ce qu’il pouvait dans son collège. Nous déplorons une nouvelle fois la manière dont ceux-ci ont été imposés et mis en place. Chacun essaie d’avancer avec ses moyens, ses compétences... et c’est loin d’être facile.
En 5e, nous relevons qu’il est difficile d’intéresser les élèves. Le programme nous paraît trop éloigné d’eux et de leur réalité. Il en est de même pour les centres d’intérêt préconisés. Nous sommes souvent devant des élèves qui ne sont toujours pas très autonomes après un an de collège. De plus, à 25 en zep ou 28 – 30 ailleurs, il n’est pas possible « d’investiguer » et de mener à bien des activités sauf à transformer la technologie en « technologie-papier ». On comprend bien l’aspect non motivant de tout cela.
En 4e, malgré certaines formations suivies cette année, le programme interroge beaucoup de collègues. Du côté des professeurs de STI, le thème de la domotique semble intéressant mais ceux-ci restent sceptiques et critiques à la vue des conditions d’exercice et du manque de moyens dans les collèges. Encore une fois, le nombre d’élèves, la taille et l’équipement des salles ne sont pas adaptés à ces programmes. Pour les professeurs de technologie, la domotique (la vraie, pas l’utilisation d’une prise télécommandée) fait peur et ils ne se sentent pas tous compétents dans ce domaine, encore moins que sur le programme de 5e d’ailleurs.
En 3e, nous sommes tous en attente et déjà bien occupés ailleurs.
En ce qui concerne les ilots, c’est une pratique utilisée jusqu’à maintenant au lycée en S - SI. Les ateliers sont organisés en deux zones : une zone avec des ilots et une zone qui permet le regroupement pour les mises en situation ou les synthèses. Cependant, cela se fait dans des ateliers ou des salles très grandes avec un effectif élèves ne dépassant pas 16. Les participants au stage ayant tenté l’organisation en ilot, ont très vite été rattrapés par les problèmes récurrents des effectifs, de l’équipement existant, du mobilier et de l’architecture de leur salle.
Les échanges entre les collègues de technologie et de STI montrent bien que nous rencontrons tous beaucoup de difficultés et que les inquiétudes sont grandes. Nous regrettons la disparition de la fabrication individuelle, source de motivation pour beaucoup d’élèves. Ce manque de fabrication dans les nouveaux programmes est d’ailleurs soulevé par certains professeurs présents au stage. Sans parler de fabrications « gadgets », d’assemblages de kits ou d’un retour à de la fabrication systématique, la quasi-disparition d’une véritable fabrication au détriment d’une réalisation amène des interrogations. Selon la typologie de certains milieux socio-culturels, la fabrication permettait aux élèves de découvrir l’utilisation raisonnée d’outils et de machines absents de leur culture et de leur éducation. Le « geste manuel » devenait ainsi un centre d’intérêt motivant pour beaucoup d’élèves.
On parle maintenant de « réalisation » collective, or avec ces réalisations, qui peuvent par exemple n’être qu’un programme pour une installation domotique, on est loin de la fabrication concrète. Nous estimons que le choix entre réalisation collective ou individuelle devrait exister comme il existait dans la première version des programmes de 6e mise en place en 2005. Le tout virtuel est utilisé pour palier au manque de moyens et vient s’ajouter au monde de plus en plus virtuel des élèves fait de jeux vidéos et autres pseudos réseaux sociaux de l’Internet.
Lors de formations suivies par certains collègues, il a été rapporté qu’une dotation financière serait débloquée pour chaque collège de l’Académie. On parle d’une dotation répartie sur 3 années et à « 4 chiffres » à chaque rentrée. Nous restons prudents concernant cette nouvelle et suivrons de prêt l’officialisation ou non de cette dotation financière. Cependant, nous faisons remarquer qu’une telle dotation devrait être accompagnée d’un guide d’équipement afin d’aider les collègues dans leur choix de matériels. On ne peut pas continuer à nous dire qu’il faut faire très attention à ce que l’on achète chez les fournisseurs « historiques » sans préciser ce qu’il ne faut pas acheter. De plus, un guide d’équipement précis permettrait d’avoir un équipement homogène dans les établissements et favoriserait le travail de tous dans le même sens pour les ressources pédagogiques. Les professeurs TZR présents témoignent de l’énorme disparité des conditions d’équipement d’un collège à un autre. Ceci ne vient pas favoriser leur travail ou celui d’un professeur victime d’une mesure de carte scolaire... ou celui des professeurs nommés sur plusieurs établissements.
Concernant les dites formations, nous faisons le constat parfois/souvent d’y être allés pour plancher et non pour y être formés. Une formation ne peut se résumer à la création de séquences pédagogiques ou l’étude de maquettes sur catalogue dans l’hypothèse d’un achat futur. Des participants au stage font état de collègues rentrant de formations découragés et perdus : « un stage nous fait constater que l’on est à côté, un autre nous montre d’une année à l’autre une approche ou une vision complètement différente d’un même programme ». Par contre, certains stages ont été bien accueillis et appréciés. Ce sont les stages où l’on peut découvrir des progressions annuelles qui tournent réellement, avec des collègues qui amènent du matériel mis en situation dans nos conditions réelles de fonctionnement. Enfin, nous regrettons les rares stages (voire leur disparition dans le paf 2010) desquels on pouvait revenir avec des supports matériel fabriqués utilisables dans nos salles.
Technologie et sécurité
A plusieurs reprises, nous avons vu en stage ou lu sur des listes de diffusion l’utilisation de maquettes achetées ou fabriquées nécessitant du 220 volts.
Nous tenons à rappeler qu’il est interdit de faire brancher ou débrancher des matériels électriques aux élèves, sauf hors tension. De plus, le professeur de technologie n’est pas habilité pour intervenir sur les installations électriques (armoire ou pupitre des salles). Toutefois, il doit s’assurer de la conformité et du bon état des prises, fiches et cordons secteurs. Enfin, il est également interdit d’utiliser tout matériel non conforme et, tout particulièrement, celui réalisé par un établissement d’enseignement, sauf respect des prescriptions réglementaires attestées par un organisme agréé. (http://www.technologie.ac-versailles.fr/spip.php?article9 ; http://www.technologie.ac-versailles.fr/spip.php?article9).
Quant à l’utilisation du cutter pour des découpes, il est utile de rappeler que le cutter est une arme de 6e catégorie et que son utilisation dans un lieu privé ne peut se faire qu’avec autorisation du propriétaire. C’est l’un des outils le plus dangereux et son utilisation est d’ailleurs interdite dans de nombreuses entreprises. Il est donc à proscrire de nos salles.
Quant à l’aspect « surchargé » de nos salles prévues pour un enseignement à effectif réduit, nous n’y revenons plus (voir ci-dessus) mais cela pose de réelles difficultés de déplacement et donc de sécurité.
Ne nous rendons pas responsables du manque de moyens ou de l’envie que l’on peut avoir à contourner les lois et prendre des risques personnels pour palier à ce manque. Il serait bon que ces problèmes de sécurité soient clarifiés par l’institution. Il serait également pertinent que les professeurs de technologie puissent être formés à la sécurité dans leur salle comme le sont les professeurs de STI.
Réforme STI
Une information est faite sur la réforme du lycée et notamment ses conséquences sur les enseignements technologiques. Avec ce compte-rendu, vous trouverez un diaporama qui compare la situation actuelle à celle voulue par la réforme dès la prochaine rentrée. (ici)
Quelques points :
- actuellement les options ISI + ISP sont de 3h + 3h => c’est terminé l’année prochaine ;
- l’année prochaine, on parlera d’enseignements d’exploration (EE). Les élèves doivent choisir deux EE : un EE de gestion et d’économie (1h30) parmi 2 possibles puis un EE (1h30) parmi 8 possibles. S’ils le désirent, ils pourront choisir un 3e EE si le second et le troisième sont des EE technologiques (5EE). Une langue ancienne ou une LV3 peut être pris en 2d EE. Attention, aucun lycée ne propose les 8 enseignements d’exploration (3 ou 4 au plus).
- disparition des modules en groupes dans les grilles horaires. Une souplesse est donnée pour des « groupes », mais les collègues devront aller « se battre » avec les autres disciplines au conseil pédagogique pour les obtenir. Au collège, on connaît bien ce fonctionnement et on connaît également l’avenir de la souplesse ainsi que l’avenir des groupes !
Formation 2010 – 2011
La campagne d’inscription pour les formations a commencé. Nous sommes surpris de l’offre proposée (http://www2b.ac-lille.fr/techno2/PAF/paf-2010-2011-generique.ht) que nous trouvons très loin de nos préoccupations premières. Les collègues réclament des exemples concrets de fonctionnements annuels dont nous avons besoin pour mettre en place ces nouveaux programmes et non des journées de réflexion sur tel ou tel sujet certes indispensables mais pas dans les préoccupations liées à l’urgence de la mise en place. Cette offre de formation ne semble pas répondre aux attentes des collègues présents.
Les professeurs de STI souhaiteraient pouvoir intégrer des formations en cours d’année scolaire en fonction de leur envoi en collège et de leurs diverses situations.
On parle de plus en plus de créations de CARTEC (centres académiques de ressources technologiques) à la rentrée prochaine. Nous constatons tous une augmentation de la charge de travail et le principe de fonctionnement de ces centres est clairement de la formation sur temps libre. Le Snes ne peut donc cautionner ce type d’initiative. La formation est un droit, n’enfonçons pas nous même un coin dans le peu de temps qu’il nous reste ! D’ailleurs, existe-t-il des CARMATHS, CARPHYS... ?
Reconversion et mutation
Une reconversion en professeur de technologie est possible pour les collègues de STI. Cependant, les témoignages montrent que celle-ci est souvent demandée pour éviter un enseignement en L.P. ou par dépit après de nombreuses années de galère. En aucun cas (ou à de rares exceptions), c’est le désir premier et réfléchi des professeurs de STI.
Cette année, des enseignants de génie peuvent demander leur affectation en technologie collège et participer au mouvement à condition d’avoir six mois d’enseignement en technologie et de faire un courrier, indispensable, par lequel le demandeur accepte en toute connaissance de cause de faire un temps plein dans une autre discipline. Attention, dans ce cas on reste professeur de génie. C’est un moyen pour l’administration de contourner le jugement du TA, évoqué au début de ce compte-rendu, et de nommer à 18 heures un enseignant hors discipline.
Enseignement intégré des sciences
Après 4 années, l’expérimentation d’un enseignement intégré des sciences physiques, de la SVT et de la technologie par un même professeur continue et s’accentue. Nous renouvelons nos inquiétudes face à ce genre d’enseignement qui n’aurait qu’un seul objectif à nos yeux : celui de réduire encore et toujours le nombre de postes et d’augmenter la flexibilité dans les établissements. Pour information, on en parle dans un rapport de l’assemblée nationale sur la mise en place du socle commun (voir page 49 et 61) : http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i2446.pdf
CONCLUSION
Ce stage nous a permis d’échanger sur les programmes de technologie et de faire le point sur leurs mises en place dans les collèges de l’académie depuis septembre 2009 (2005 pour les 6e). Chacun a pu faire part de ses remarques, impressions ou avis personnels.
Les attentes et les besoins sont nombreux mais les plus urgents sont les suivants :
– des groupes d’élèves n’excédant pas 16
– une dotation financière accompagnée d’un guide d’équipement
– une prise de position claire de l’inspection sur la sécurité : 220V / cutter / évacuation des salles ...
– une offre de formation plus proche de ce qui peut être mis en place dans nos établissements avec nos conditions REELLES de fonctionnement ;
Willy Leroux, Boris Duquesne, Francis Lecher