Le SNES revendique une déconnexion de l’évaluation et de l’avancement de carrière pour tous (progression au rythme le plus rapide). Cette proposition doit être réaffirmée, car mettre en concurrence les personnels dans l’attribution des promotions crée des rancœurs, compromet la qualité du service public quand le sentiment d’injustice, de non-reconnaissance du travail fait s’impose, ce qui se passe pour la hors-classe dans l’académie de Lille depuis des années confirmant que l’évaluation d’une notion aussi controversée que le « mérite » repose sur des critères et des éléments de barèmes discutables :
– retards d’inspection supérieurs à 5 ou même 10 ans par absence ou insuffisance d’IPR, ou en raison d’une distance trop éloignée de Lille de l’établissement du collègue (réduction des frais de déplacement pour les IPR aussi) ou encore de la situation familiale (congé parental, temps partiel, …) constituent autant de freins à une carrière ;
– avis reposant de plus en plus sur le travail réalisé « hors classe » : absence de « rayonnement » sanctionné, de même que l’absence de travail en équipe ou d’investissement dans un « projet » … quelle que soit par ailleurs la qualité du travail réalisé en classe et les résultats des élèves ;
– dévoiement du rôle du chef d’établissement qui s’arroge de plus en plus un droit à juger la pédagogie des collègues et les contenus enseignés (avec la bénédiction du rectorat et dans le silence assourdissant des IPR), parfois même en contradiction avec l’avis défendu par ces derniers dans les rapports d’inspection ;
– disparités fortes entre établissements et / ou disciplines : on trouve cette année une répartition très étalée de l’attribution des avis exceptionnels (de 0 à plus de 60 %), avis déterminants pour obtenir la promotion ;
– barème qui diffère d’une académie à l’autre : un certifié promu dans l’une ne le serait pas dans l’autre, le mérite serait donc à géographie variable ?
Pour autant, le SNES doit défendre la nécessité et l’utilité d’une évaluation individuelle, pour plusieurs raisons :
– une évaluation collective ne pourrait être envisageable qu’en cas de redéfinition de nos services dans le sens d’une diminution des heures de cours pour permettre la concertation et la mise en place d’éventuels projets. Et quand bien même, une évaluation de ce type ne permettrait pas d’évaluer ce qui constitue l’essentiel de nos métiers et de notre temps de travail. Par ailleurs, une évaluation collective qui se déroulerait mal aurait des conséquences désastreuses sur le fonctionnement de l’équipe, ou même une inspection positive (l’investissement de chacun est difficilement quantifiable, d’aucuns auront cependant le sentiment de s’être davantage impliqué que d’autres, avec un résultat similaire) ;
– la longueur des carrières, l’évolution des métiers rendent nécessaires de faire le point ponctuellement pour procéder à des réajustements ;
– les fonctionnaires ont des comptes à rendre aux usagers dans le cadre de leurs missions de service public.
Pour cela, il faut redonner à l’inspection sa dimension d’aide et de conseil, avec la possibilité de contester le rapport d’inspection et d’être reçu en entretien en présence d’une tierce personne choisie par le personnel inspecté. Il est inadmissible qu’une trop rare visite d’un inspecteur se solde par une remise en cause destructrice, des pleurs ou un arrêt maladie, tant le propos peut être brutal et disproportionné, parfois en décalage complet par rapport à l’investissement et aux résultats obtenus par les élèves aux examens.
Il faut également une plus grande régularité des visites afin de les dédramatiser, une harmonisation des demandes effectuées par l’IPR avant et au cours de l’inspection, ainsi que des critères d’évaluation, connus à l’avance.
Comment éviter que l’inspection ne serve qu’à évaluer la mise en place des réformes du moment ?
Faut-il envisager le retour à des « inspections surprises » évitant les cours mis en scène par certains collègues ?
Karine Boulonne