Audience
Snes - Mme Vanoosten
Nous avons rencontré mercredi 02 juin 2004, à notre demande, Mme Vanoosten IPR-IA de Technologie dans l'Académie de Lille. Lors de cette audience, qui a duré près d'une heure et demie, nous nous sommes entretenus sur la situation de la discipline dans l'académie et avons échangé nos points de vue sur son devenir national.
1.
Le moral des
collègues
Nous avons fait part de notre grande inquiétude concernant le moral des professeurs de Technologie de l'Académie. Nous nous sommes appuyés pour cela sur les collègues rencontrés dans nos établissements, dans des stages de formation, dans nos stages syndicaux ainsi que sur les échanges électroniques que nous avons avec d'autres, via les associations ou le Snes.
Pour nous, les collègues n'en peuvent plus et sont écoeurés du traitement infligé à la Technologie. Le moral des troupes est plus que jamais « dans les chaussettes » :
- diminution des horaires,
- augmentation des effectifs, disparition des groupes,
- suppressions des 4ème NTA, des 3ème option techno d'aide et d'excellence,
- multiplications des expérimentations,
- moyens financiers et matériels insuffisants dans les établissements,
- problème récurrent du financement des objets confectionnés,
- bagarre dans les C.A. pour des bouts de ficelles,
- quant à l'heure de labo, elle apparaît maintenant comme un détail face à l'ampleur des problèmes que côtoient chaque jour nos collègues.
Pourtant, sans cesse, on vient les chercher pour expérimenter ou participer à des dispositifs. Toujours, les professeurs de Technologie ont répondu présents mais toujours, ils ont vu leurs conditions de travail se détériorer.
S'appuyant sur ses
inspections et celles de ses collaborateurs, Mme Vanoosten est moins pessimiste
que nous sur le moral des professeurs mais reconnaît que la situation peut
parfois être difficile. Elle continue de voir lors de ses inspections des
professeurs qui effectuent un très bon travail. Son rôle, c'est aussi
d'entretenir « la flamme » pour que nous ne baissions pas les bras et
elle continuera de faire tout ce qu'elle peut pour cela.
Elle
nous rappelle que son rôle est surtout pédagogique.
Au
niveau des groupes, elle souligne que l'Académie de Lille faisait figure
d'exception sur le plan national et qu'il est effectivement difficile de les
obtenir lorsqu'il n'y a pas de texte statutaire (à part pour les
6ème). Elle continue de faire remarquer aux Principaux qui
l'accompagnent dans certaines inspections qu'à plus de vingt élèves, on ne peut
plus faire de la Technologie mais regrette d'assister certaines fois à des cours
magistraux alors que les élèves sont en effectifs allégés.
Pour
ce qui est de la suppression des 4ème NTA et des 3ème à
options technologiques, elle est consciente des problèmes que cela peut
engendrer au niveau des mesures de cartes scolaires même si toutes les
suppressions de postes ne sont pas seulement dues à ces disparitions. Cependant,
elle rappelle qu'elle avait créé, avec le Recteur Monsieur Fortier, ces options
pour valoriser la discipline, lui donner un pôle d'excellence et aussi pour
limiter la suppression de postes à cause de la disparition des 4ème
et 3ème techno. A un an d'une harmonisation de toutes les
3ème, on perd finalement ce que l'on a gagné de manière volontariste.
Nous lui confirmons que les collègues font du mieux possible leur travail avec parfois des moyens dérisoires. Cependant, le moral n'y est plus alors que l'ensemble des professeurs de Technologie représente (ait ?) un gros potentiel (adaptation, volontariat, auto-formations...) pour une Education Nationale de qualité. Nous insistons sur le fait que ce problème ne touche pas que les plus anciens mais aussi les jeunes collègues. Ainsi de plus en plus, les collègues préfèrent « s'occuper de leurs arbres » plutôt que multiplier les sacrifices en se battant pour « des bouts de ficelles » alors que d'un autre côté on leur reprend « des cordes entières ».
Nous précisons qu'aujourd'hui pour que la Technologie fonctionne dans un Etablissement, il faut :
- un principal qui donne les moyens à la discipline de fonctionner (volonté de valoriser cette culture, effectifs allégés, moyens financiers),
- que la Technologie soit représentée au Conseil d'Administration,
- que les collègues travaillent en équipe avec un projet disciplinaire sur les 4 années,
- un investissement individuel et collectif considérable pour les préparations et la maintenance du matériel...
Pour nous, cela représente trop de conditions pour que l'on puisse continuer ainsi. De plus, si la première des conditions n'est pas remplie, la Technologie ne peut pas fonctionner. Notre discipline est la seule à dépendre à ce point d'une volonté locale. Nous demandons une meilleure harmonisation des conditions de travail (et pas par le bas), ce qui serait un encouragement et une reconnaissance pour la discipline.
Mme
Vanoosten reconnaît qu'il y a beaucoup de conditions pour que la Technologie
fonctionne et qu'en effet son fonctionnement dépend essentiellement des
principaux de collèges. Un cadrage des moyens n'est pas de son ressort. Au
niveau du matériel, les conseils généraux ne semblent pas disposés, aujourd'hui,
à faire des dotations pour la discipline, discipline qui coûte cher et qui
change trop souvent à leurs yeux.
2.
Les nouvelles
options
Nous lui faisons part des dérives de fonctionnement, dont nous avons connaissance, concernant les options à projet professionnel en 3ème. Là aussi, au nom de l'autonomie des Etablissements, on voit tout et n'importe quoi : des élèves à qui on retire l'enseignement de la Technologie « tronc commun » en 3ème, des heures d'enseignement que l'on retire à la Technologie...
Nous lui demandons, encore une fois, qu'un cadrage plus précis et plus rigoureux soit fait pour éviter les dérives.
Quant aux futures options à projet technologique industriel en lycée Technologique, nous lui faisons part de notre inquiétude quand on sait que les élèves qui suivront cette option, seront accueillis au lycée pour y faire, en gros, le programme de Technologie de 3ème. Et cela à 12 alors que nous nous battons pour la sauvegarde des groupes et que l'on s'entend souvent dire que ce n'est pas possible.
Ces
options ont été créées pour améliorer l'orientation au
Collège en attendant la réforme de la 3ème.
Mme Vanoosten a
constaté effectivement les différences de fonctionnement des « option
pro » selon les bassins. Elle préfère un regroupement d'une douzaine
d'élèves venant de collèges différents plutôt que de voir dans une seule option
douze élèves d'un même collège. Ce dernier fonctionnement pouvant faire perdre,
en effet, des moyens à la discipline. C'était le sens du texte cadrant ces
options dans lequel il est écrit « l'accueil en lycée professionnel est
organisé sur les heures de technologie ». Ces deux types d'options existent
en attendant la nouvelle 3ème qui balayera ces deux expérimentations.
D'ici là, il n'y aura pas de nouveau cadrage possible. Elle comprend néanmoins
notre inquiétude par rapport aux « option PTI » dont les finalités
sont plus discutables que « les options pro ».
Pour terminer sur ce point, nous renouvelons notre désaccord sur le principe de soustraire des élèves à l'enseignement de la Technologie au Collège, enseignement obligatoire jusque la fin de la 3ème. De même, nous ne pouvons accepter que des moyens soient pris à la Technologie pour faire fonctionner ces expérimentations.
3.
Les
formations (PAF 2004 - 2005)
Nous nous sommes d'abord réjouis de voir une offre stable en quantité de stage (17) par rapport à d'autres Académies.
Sur le stage Segpa : nous demandons si l'existence de ce stage au PAF est lié à la présence de plus en plus importante des collègues pour enseigner dans ces sections.
Mme Vanoosten est favorable à l'intervention
des Professeurs de techno en Segpa sur les niveaux 6, 5, 4. Si la techno doit
être dispensée en Segpa, ce sont eux les mieux placés pour y intervenir. Par
contre, les formations qualifiantes de 3ème ne peuvent pas être
confiées aux collègues.
Concernant les stages « CFAO » et « modeleur volumique », nous précisons que les collègues sortent de ces stages très emballés. Mais le retour dans l'établissement met vite fin à l'enthousiasme : coût exorbitant pour l'achat de machines automatisées « célèbres » et investissement informatique (machines et licences du « célèbre » modeleur) beaucoup trop important. Nous alertons aussi sur le fait que ces outils plongent les élèves dans une virtualité dangereuse des formes de pièces et les éloignent des connaissances de base : dans quel sens tourne le foret ?
Mme Vanoosten nous fait remarquer que dans
l'académie la priorité n'est pas mise sur ces approches virtuelles. Quant à
l'investissement, il est effectivement trop conséquent pour un établissement
sans aide des conseils généraux.
Pour le stage « maquettes et interfaces » : nous faisons remarquer qu'encore une fois il nous semble que seuls les collègues de techno sont amenés à réaliser leurs matériels en « auto-équipement » (matériel d'un niveau électronique assez conséquent pour les interfaces)
4.
L'avenir
proche
Nous terminons cet entretien en discutant de la refonte annoncée des programmes de 6ème et de 3ème. Nous sommes en possession des mêmes documents : le compte rendu d'audience du Snes (24 avril) auprès de M Secrétan (voir TechnoFlash 7 disponible sur le site académique du Snes, dans les secteurs, technologie) et son discours du 27 mai à « Cybertech 2004 » (http://www.pagestec.org). Ces deux documents décrivent 2 concepts de Technologie qui semblent s'opposer alors qu'ils sont émis par la même personne.
Nous sommes donc dans le flou total après deux ans de travaux au ministère, nous attendons impatiemment les documents qui seront présentés au conseil supérieur de l'éducation du 24 juin 2004 pour être fixéssur le sort de la Technologie.
Nous sommes tout de même inquiets du devenir de la discipline. Partant d'un simple toilettage sans doute nécessaire, nous voici avec deux changements de programmes annoncés pour la rentrée 2005 alors que la commande initiale du ministère était une refonte du programme de 3ème !
Mme
Vanoosten attend, elle aussi des informations plus précises. Elle est consciente
que l'on va encore perdre une demi-heure en 3ème mais est soulagée
que l'on maintienne la Technologie dans le tronc commun de ce niveau. En effet,
elle rappelle que dans un premier projet, il était question de la supprimer
totalement en 3ème et qu'elle s'est battue contre cela au Ministère.
Elle espère que cette réforme n'entraînera pas un changement des finalités de la discipline et appelle (tout comme nous) les Professeurs à s'exprimer lors de la consultation nationale qui devrait avoir lieu à la rentrée prochaine.
Willy Leroux / Boris Duquesne